Par Valérie Darveau
Comment ne pas se réveiller ce matin avec un goût amer dans la bouche, la tête en tempête, en se demandant si on a pas rêvé tout ça.
Des averses qui ont laissé l’asphalte encore mouillée d’hier soir. On se lève sous un ciel triste et gris, pour l’une des rares fois de l’été. La météo a revêtue sa parure de circonstance, dira-t-on.
Comment ne pas se réveiller, donc, avec cet étrange espoir d’avoir fait un drôle de rêve. Ça fait six mois qu’on se bat, mais pas pour ça. Je gage qu’on utilisera le mot violence avec beaucoup plus de prudence dans les prochains mois à l’Assemblée nationale.
Avec 71% de la population qui est allé voter, on peut être fiers d’avoir remis la politique à la mode, d’avoir tapé assez fort sur nos casseroles pour réveiller beaucoup de gens. On a crié (hurlé) de joie en constatant la défaite de Jean Charest dans son propre comté. Tin toé, qu’on s’est dit.
Mais.
Mais le Québec se réveille ce matin déchiré. De notre côté, du mien à tout le moins, on se demande comment c’est possible qu’après ce printemps, des gens puissent encore voter aussi massivement pour le PLQ. Ou-ache.
Sauf que voilà, peut-être que beaucoup de gens ont peur. Ma génération était beaucoup trop jeune pour saisir le climat de tension du référendum de 1995, et il faut croire que ce beaucoup de gens a très peur d’y retourner. Laissez vos roches par terre, ce n’est qu’une hypothèse.
On ne s’est pas battu pour ça. On s’est battu en s’unissant, en s’organisant, en créant ensemble. On se réveille ce matin devant un Québec divisé, apeuré, perplexe, profondément mal à l’aise.
On savait depuis un moment déjà que les 6 derniers mois n’auraient pas d’issue idéale. Cette grève a été ardue, belle mais sale, et on ne consommerait pas de victoire le poing levé. La victoire n’existerait pas à court terme, mais apparaîtrait dans le long terme, avec une génération qui serait, on l’espère, plus politisée et progressiste.
Sauf que là, what the fuck.
2 comments
Jerome Mongeau says:
sept 5, 2012
J’ai la forte impression que de tenter de repousser le vote libéral par la haine est inutile, ou plutôt ne donne que des victoires éphémères, car le mal et la peur reviendront toujours prendre leur place si le vide n’est pas comblé.
On a eu des élections avec trois partis qui ont 30% des votes, un p’tit ~10% pour tout ce qui est à gauche du PQ et 30% de la population qui n’a pas voulu voter. En somme, c’est le statut-quo, le vide qui laisse toute la place aux peurs et aux « créatures de l’ombre ».
Ce qu’il manque dans tout ça pour que le Québec danse enfin, et sur la même musique? Un projet de société. Un bal où tout le monde peut contribuer.
C’est uniquement dans un « upward spiral » qu’on peut unifier et aller à quelque part ensemble – que l’amour comble le vide.
Michel Belisle says:
sept 5, 2012
On n’a rien rêvé, on a tout vécu. Tous ceux qui ont participé de près ou de loin, dans la rue, les ateliers, les bars, les cafés, les parcs, en fait partout où on peut se rencontrer, ont aidé à faire naître un sentiment non seulement d’appartenance mais de participation.
Les élections ne sont pas la fin, abroger la Loi 12 (78) n’est pas une fin, la gratuité scolaire n’est pas une fin. La fin ou plutôt une continuation douce inscrite dans les moeurs de tout un chacun sera lorsque nous nous impliquerons activement dans les processus et actions du gouvernement. Fini pour lui de voguer librement sur sa propre mer, loin des rivages de son peuple.